jeudi 8 août 2013

De la lecture (facile) et des Hunger Games.



J'avoue que ni le film, qui a déclenché mon envie de lecture, ni cette série n'étaient à mon programme. Je comptais gentiment m'enfiler  Les Annales du Disque-Monde, entrecoupé de Proust, de Hugo, et de tout ce qui me passerait par la tête. Et bien cette série m'est passée par la tête. J'ai hésité à en parler ici, parce que ça n'a pas été un coup de coeur absolu, comme a pu l'être L'Homme qui savait la langue des serpents, par exemple. Alors pourquoi j'en parle ?

D'abord, parce que j'ai lu l'intégralité des bouquins en trois jours. Or, ces derniers temps, notamment avec Proust, j'ai l'habitude de rester squotchée des semaines au même bouquin ; bref, j'ai aimé cette sensation de ne pas pouvoir lâcher le livre, et de ne plus me rendre compte que je commençais un nouveau chapitre alors que je venais de me promettre d'arrêter à la fin du précédent. Ca faisait vraiment longtemps que je n'avais plus eu cette envie dévorante de continuer ma lecture, ce plaisir ayant été repris depuis la prépa par les séries TV. Je ne suis pas en train de dire que ça fait trois ans que ça m'ennuie de lire, et que je dois batailler pour finir une page de Chateaubriand ; mais la lecture de Littérature (oui, avec une majuscule, c'est la vie les amis) apporte un autre plaisir, plus subtil, plus fin, et intellectuellement ravissant... Moins passionnel, néanmoins. S'il m'est arrivé, heureusement à plusieurs reprises, d'être réellement passionnée par de la littérature (notamment Les Misérables qui m'a aidé à supporter mes concours blancs de la 1e khâgne), je ne crois pas avoir eu le même envol qu'en me plongeant pendant une semaine dans Les Piliers de la Terre, ou dans Hunger Games (puisque c'est de ça dont je suis censée parler). Je crois que mon esprit à besoin de ce genre de plaisirs faciles, rapides, et passionnants. N'en déplaise à l'Accadémie.

Si j'ai décidé de faire une chronique entière sur cette série, c'est aussi parce que c'est une lecture bête intelligente. Oui, j'aime lire des livres qui ne sont pas considérés comme de la Grande Littérature, par moments, pour me détendre. Mais je ne lis pas n'importe quoi (je ne vais pas lire Twilight pour le "plaisir" de lire quelque chose de facile...) : je garde certaines exigences, surtout depuis ma prépa. Lorsque j'ai relu la série Eragon, je lui ai allègrement craché à la gueule pour son manque de style et de cohérence interne, par exemple. Ici, il s'agit d'une série intelligente, et plutôt bien écrite, malgré le style un peu saccadé qui manque parfois d'articulation. J'ai eu la chance que ma bibliothèque dispose des volumes en anglais et en français, ce qui m'a permis de les dévorer en français, tout en faisant un comparatif dès que possible quand la traduction m'intriguait. Bon, le style n'est pas extraordinaire, ça ne vaut pas un bon Balzac à ce point de vu, mais il existe, et pour cette catégorie de série à succès, c'est déjà quelque chose qui mérite de s'y attarder. 


Je ne ferai pas de résumé de la série, Wikipédia fait ça mieux que moi. En plus, je ne veux pas spoiler l'intrigue à ceux qui préfèreraient la découvrir à travers les films, qui, si on se réfère au premier opus, sont très respectueux des livres (c'est assez rare pour être souligné). Je vais simplement dire que l'action y est bien menée, sans incohérences majeures, le rythme est captivant, et laisse la place à un développement des personnages plutôt subtil. J'ai été très surprise de la narration à la première personne, parce que le film que j'ai vu en premier, nous faisait très peu ressentir les émotions de Katniss (l'héroïne, donc). Mais ça fonctionne bien. Le développement de l'univers est travaillé, et n'arrive jamais comme un cheveu sur la soupe, en mode "bon, maintenant petit lecteur, on va tout t'expliquer d'un coup comme ça tu seras bien préparé à un retournement qui arrive gros comme une maison vu qu'on met un demi-chapitre à t'exposer tout le fonctionnement du bousin".

 Je pense que le maître mot est la subtilité. Malgré le monde dystopique que Suzanne Collins met en place, on est jamais dans l'overdose de bons sentiments ou de pathos. Cet équilibre se fait grâce à la narration à la 1e personne, justement, car l'intériorité de Katniss, très dure, permet d'éviter l'écueil du surplus de sentiments. Il en va de même pour le risque d'excès de violence. Je ne pense pas spoiler qui que ce soit en disant que les Hunger Games sont des combats à mort, et qui pourraient donc justifier une débauche de trash, dont le public, notamment adolescent, est très demandeur. Suzanne Collins évite à la fois la pudibonderie qui ne scierait vraiment pas au sujet, en excluant par exemple toutes les scènes d'exécution, et le porn trash qui aurait pu avoir lieu. 

Enfin, comme dans toutes les dystopies (une majorité en tout cas), il y a un message politique. Même si celui-ci frôle le manichéisme, il reste intéressant, et porteur. On se retrouve dans les événements et les indices laissés par Suzanne Collins, et quelque part, c'est également une leçon d'histoire, et une chambre d'échos. Un de ceux qui, je pense, n'a pas été voulu, mais que j'ai pris en pleine face, est le fait que les Hunger Games sont filmés, et doivent être considérés comme un divertissement pour les populations (notamment de la capitale). Il y a eu un lien direct qui s'est tissé en moi, entre ces Hunger Games, et Acide Sulfurique d'Amélie Notomb, où les autorités créent une téléréalité à partir d'un camp de concentration réél. Il y a une vraie réflexion sur les médias, l'information et son détournement, qui est assez intéressante. 



Je vous laisse donc découvrir cette série, si, comme moi, vous avez envie d'une lecture bête-intelligente. 

9 commentaires:

  1. "Je crois que mon esprit à besoin de ce genre de plaisirs faciles, rapides, et passionnants. N'en déplaise à l'Accadémie." C'est exactement la même chose pour moi, et comme toi je me suis remise à lire des livres de ce type pour me détendre un peu l'esprit. Donc par rapport à la "lecture bête-intelligente", je crois surtout que l'important est que tu te fasses plaisir en lisant ! Je trouverais ça dommage que selon notre âge ou nos études on soit obligé de s'interdire la lecture de livres plus "simples". De mon côté j'ai juste vu le film, que j'ai beaucoup aimé, et j'apprécie la critique que tu fais des livres. Merci donc pour cet article, je lirai peut-être la série un jour, même si pour l'instant j'ai d'autres projets de lecture.

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    1. Moi j'en ai toujours lu ! J'en ai réellement besoin pour relancer mes envies de lectures "sérieuses". Le fait est que je peux me faire très plaisir en lisant du Stendhal ou du Proust, mais un plaisir différent, plus intellectuel, alors que lire ce genre de livres est plus du domaine de la goinfrerie. Pour continuer le parallèle de la nourriture, ce serait un peu comme dire que j'apprécie énormément les bons restaurants, fins, avec de la nourriture de qualité, mais qui demandent un investissement (en l'occurrence financier) supérieur, mais de temps en temps, j'aime me goinfrer d'un kebab. Fin du parallèle ^^

      Je suis contente que ça t'ai plu ! Je te la conseille (obviously) en tout cas !

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  2. Je suis fan du parallèle que tu viens d'établir avec la nourriture, Sarah ! C'est exactement ça pour moi ! :D Et merci pour cette critique qui donne envie de jeter un œil aux bouquins de cette série, puisque pour ma part, comme Esmeralda, je ne connais que le film.

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    1. Haha, c'est ce qui me semble le plus évident pour expliquer que la Littérature n'est pas exclusive, et heureusement !
      Je te souhaite de bonnes lectures, si tu décides de te lancer là dedans. :)

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  3. Je suis totalement en accord avec ta position sur cet article. Même si Suzanne Collins ne sera pas la prochaine Jane Austen, elle a quand même quelque chose qui mérite attention. J'ai beaucoup aimé la narration à la première personne et, je trouve, la lecture en Anglais est beaucoup plus gratifiante que la lecture en français pour apprécier la première personne. Enfin. Je trouve le parallèle intéressant avec les médias.

    Les personnages sont souvent dans l'excès. Effie, Haymitch, Peeta, Gale et même Katniss. Mais justement il y a un jeu d'équilibre et des apports respectifs. Je pense notamment à Effie pour qui je n'avais que de l'aversion jusqu'à ce que je comprenne qu'elle se prête au jeu, résignée, pour survivre. Cela témoigne bien de notre époque en contraste et fait réfléchir. Et le personnage de Haymitch également ! Détruit par la célébrité, la télévision, les médias et l'arène.

    Enfin bref, je te rejoins sur le plaisir de lire des livres moins littéraires.

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    1. Pourquoi tu trouves la 1e personne plus intéressante en anglais ?
      Oh, je n'ai jamais rien eu contre Effie ; je pense qu'elle est juste bête, et qu'elle se contente de jouer le jeu parce qu'on ne lui a pas appris à faire autrement, à se poser des questions, et que jusqu'au 3e tome, elle n'imagine pas qu'autre chose soit possible. Je suis d'accord sur la réflexion qu'apporte le livre, comme beaucoup de dystopies, d'ailleurs (je viens de voir une chronique du Fossoyeur de films qui disait justement que toute histoire évoquant le futur parle des travers du présent).

      En parlant de Haymitch, j'ai été contente de voir combien Katniss est traumatisée par tout ça, contrairement à beaucoup de fictions pour ados/jeunes adultes où une fois le danger passé, tout va bien (vive les happy ends). Là, on sent ses fêlures, et j'ai apprécié ce côté réaliste : une histoire ne s'arrête pas à une victoire.

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    2. Selon moi, elle rend déjà mieux. Elle donne plus de profondeur au personnage alors que, par moments, en Français, je me suis un poil ennuyé; après je pense que tout est une question d'appréciation de la part du lecteur.

      Sinon je suis bien d'accord sur Katniss. Il n'y a pas de happy end, seulement une fin, plus ou moins heureuse aux trois tomes mais quand bien même, une fin.

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  4. Je trouve assez rassurant de voir que tu suis autant de séries ! Tu en regardais aussi pendant ta prépa?

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    1. Oui ! Et j'ai même commencé la plupart d'entre elles en prépa ! C'est une simple question d'organisation. :)

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